Le SE5A de l’AJBS
Construits en 1983, pour le tournage du film « l’As des As », les deux répliques de SE5 furent élaborées à partir de cellules de Stampe largement modifiées par Marcel Bellencontre, sous la direction de Jean Salis et de Roland Payen avec le concours de quelques bénévoles de l’AJBS.
Les principales modifications portèrent sur le remplacement des atterrisseurs, la transformation de la partie AR du fuselage, la modification des empennages, la suppression des saumons d’ailes arrondis du Stampe et l’adaptation de moteurs Lycoming 180 CV installés dans des capots similaires à ceux de l’Hispano 200 CV.
La seule différence visible pour un oeil non averti reste la flèche des ailes, alors que l’avion original n’en possédait pas, mais il avait du dièdre que n’ont pas nos répliques.
L’un de ces deux répliques, le F-AZCY devint la propriété de l’AJBS à l’issue du tournage.
La motorisation beaucoup plus fiable du Lycoming, nous permet d’une part de faire un peu de voltige basique, mais également de déplacer l’avion dans d’autres manifestations aériennes pour le plus grand plaisir des pilotes et du public, à qui nous pouvons offrir des simulacres très réalistes de ce que furent les combats de 14/18.
En 2000, après 15 années de vols et de participation à divers autres tournages et manifestations diverses, une révision générale fut menée par les bénévoles de l’AJBS sous la conduite de Jacques Habert; en particulier la révision générale de toute la menuiserie fit exécutée de main de maître par Maurice Monti.
A l’issue de cette rénovation, le F-AZCY reçu la livrée qu’il porte toujours; celle de l’avion que pilotait l’As Anglais Albert BALL, titulaire de 44 victoires, dont 17 à bord d’un SE5, avant de tomber à son tour, sous les coups d’un Albatros D III, le 7 mai 1917 à l’Age de 20ans.
Depuis quelques années, l’avion est entretenu et le plus souvent piloté par Emmanuel Brion; un des jeunes membres de la nouvelle génération de l’AJBS.
Albert Ball dans le cockpit de son SE5A
Royal Aircraft Factory SE5A » Réplique » N°03 construite en 1983
Propriétaire: Amicale Jean-Baptiste Salis depuis 1984
Immatriculé F-AZCY depuis le 06/03/1984
Royal Aircraft Factory SE5A » Réplique » N°02 construite en 1983
Propriétaire: Salis depuis 1984
Immatriculé F-AZCN depuis le 12/04/1984
L’avion original
Constructeur: Royal Aircraft Factory
1er vol: 24 novembre 1916
Motorisation : V8 refroidi par eau Wolseley W4A Viper ou Hispano Suisa de 200CV
Envergure : 8,11 m
Longueur : 6,38 m
Hauteur : 2,39 m
Masse à vide : 640 kg
Masse maxi décollage : 900 kg
Vitesse maximale: 222 km/h
Plafond : 5200m
Rayon d’action: 480 km
L’avion était de conception plutôt moderne pour son époque, incorporant des longerons en spruce, raidiseurs en corde à piano et quelques nervures pleines. Le plan fixe était réglable en vol. Le fuselage était composé de longerons en frêne rigidifiés par des croisillons en corde à piano recouvert de contreplaqué jusqu’au niveau du longeron avant de l’aile. Le reste était entoilé. Le réservoir principal était derrière le moteur secondé par une nourrice située dans le bord d’attaque central de l’aile supérieure.
Seuls 77 exemplaires de la version de base S.E.5 furent fabriqués avant l’apparition de la version S.E.5a et au total environ 5 200 S.E.5 de différentes versions furent construits dans six usines, dont Austin Motors et Vickers. Certains appareils étaient biplaces et servaient d’avions d’entraînement. Il était également prévu de faire fabriquer mille S.E.5 pour les États-Unis par la société Curtiss mais la fin de la guerre mit un terme à ce projet.
Les problèmes de moteur qu’a connu le S.E.5 à ses débuts furent résolus avec l’introduction d’un moteur Hispano-Suiza de 200 ch (147 kW) ou Wolseley Viper (moteur Hispano-Suiza avec un taux de compression plus élevé). Cette évolution a permis à l’avion de gagner 45 km/h en vitesse. Le S.E.5 était un avion très solide et était de ce fait un chasseur idéal. Il était aussi, avec 222 km/h, un des avions les plus rapides de son époque, au même niveau que le SPAD S.XIII.
Le S.E.5 était doté d’une mitrailleuse synchronisée Vickers cal. 7,7 mm qui était fixée sur le flanc gauche du fuselage. Une autre mitrailleuse Lewis cal. 7,7 mm était fixée au-dessus de l’aile supérieure.
À partir de mars 1917 le S.E.5 entra en service au sein du squadron No. 56 du Royal Flying Corps et le 22 avril 1917 cet appareil effectua sa première patrouille au-dessus de la France. Le S.E.5a entra en service à partir du mois de juin de la même année.
En 1918, 21 escadrilles britanniques et 2 américaines étaient équipées de S.E.5. De nombreux As alliés ont volé sur S.E.5, comme par exemple Billy Bishop, Raymond Collishaw, Edward Mannock et James McCudden. L’as anglais Albert Ball n’avait initialement pas beaucoup d’estime pour cet appareil, mais il a quand même obtenu 17 de ses 44 victoires aériennes aux commandes d’un S.E.5.
Le point de vue des mécaniciens
J’ai piloté le SE5A
Jean Pierre LAFILLE raconte:
« Le SE-5 de l’Amicale fut réalisé, en 1983, pour les besoins du fim « L’as des as », il possède donc un moteur moderne, puisqu’il est important, en tournage, de ne pas être gêné par de trop nombreux incidents techniques, ainsi que des freins, une loi, assez stupide je vous l’accorde, interdisant rigoureusement de tuer les câdreurs et les metteurs en scène.
Pour le reste, si l’avion ressemble un peu au SE-5, il est quand-même plus esthétique (ou moins vilain) que le vrai, mais vole aussi bien. En fait, puisque quelques pièces de Stampe SV-4 rentrent dans sa composition, on pourrait dire que ce avion vole comme un Stampe, mais comme un un Stampe plus nerveux et au pilotage plutôt plus précis. La raison de cela peut être le fait que les ailes sont plus courtes, les gouvernes arrières différentes, le fuselage plus haut et le moteur plus puissant, ou plutôt un subtil mélange de tout cela, je n’en sais rien, mais le fait est que les trajectoires sont particulièrement nettes et que les turbulences sont moins gênantes que sur le SV4.
Suffisamment motorisé par son 180 Lycoming, l’avion accélère rapidement et décolle étonnamment court, mais sans que le couple moteur, ou plutôt le souffle hélicoïdal constitue la moindre gêne. Il est bien évident que, comme tous les avions à patin de queue, le maintien de la trajectoire de décollage incombe au pilote, ainsi que la mise à l’horizontale après la mise de gaz, mais cela se fait sans dificulté et, après un petit palier de prise de vitesse, la montée est franche, une petite pression sur le palonnier droit étant seulement nécessaire au maintien de la bille au milieu, comme il se doit d’ailleurs sur presque tous les avions équipés de moteurs américains.
En palier, avec un régime de quelque 2.500 tours/minute, la vitesse atteint pratiquement 170 kilomètres à l’heure, pour une consommation de quelque 35 litres/heure, ce qui est assez convenable pour un appareil ressemblant en fait à une sorte d’aéro-frein motorisé. La maniabilité est excellente, l’avion répondant étonnamment bien en gauchissement, et d’ailleurs tout aussi efficacement aux autres commandes. Le profil de l’aile, plat comme il se devait sur le avions de cette époque, permet d’ailleurs des évolutions serrées sans perte de vitesse exagérée, donc sans risque de décrochage, et permet même de nombreuses figures de voltige à partir de la puissance et de la vitesse de croisière. Je n’insisterai évidemment pas sur les figures mais je dois avouer que, au cours du tournage de l’As des as, j’ai dû effectuer quelques manoeuvres assez inhabituelles, l’autorotation étant la plus classique, sans jamais avoir l’impression d’un quelconque refus de la part de l’avion. Par fort vent latéral, pour peu que le gauchissement soit bien utilisé (manche à fond dans le vent), l’avion décolle droit, mais avec une légère tendance à incliner, surtout si l’on n’affiche pas très rapidement la puissance maximale. Par contre, curieusement, l’atterrissage ne pose pas le moindre problème s’il est effectué avec les corrections indispensables.
Quand le vent est faible, ou dans l’axe, l’atterrissage redevient facile, surtout si l’on applique la technique que, jadis, michel Berlin nous imposait quand il tentait de nous inculquer « l’Evangile selon Saint Yan ». Il nous disait alors : « Après une approche à la vitesse correcte et l’arrondi permettant un vol à moins d’un mètre du sol, il n’y a plus qu’à empêcher l’appareil de se poser; il voudra descendre, mais vous devez l’en empêcher jusqu’à ce qu’il vous fasse nettement sentir qu’il en a marre de vos ordres idiots et atterrisse quand-même.
Alors, vous aurez effectué la manœuvre parfaite que vous auriez probablement ratée si vous aviez tenté de tangenter le sol ». Il est bien évident que cette technique, valable sur de nombreux avions, ne l’est pas sur tous, mais elle donne d’excellents résultats sur le SE-5 de l’Amicale.
Un dernier mot pour parler du roulage: Comme le patin de queue a tendance à empêcher les zig-zags et que la visibilité vers l’avant, quasi nulle, les rend nécessaires, on doit le plus souvent rouler avec la gouverne de profondeur en avant, afin de soulager ledit patin qui, par ailleurs, n’aime pas beaucoup les pistes ou les bandes de roulement en dur. Même si cet appareil ne s’apparente pas à un quelconque bovidé (vache ou veau), il préfère l’herbe. »