Le Beech 18S

Le Beech E18S de l’AJBS

Construit en 1958, dans l’usine de Wichita, le BA-359 fait partie d’un lot de 75 avions.

On ne connait pas grand chose de sa carrière américaine, si ce n’est qu’il fut utilisé par le Kentucky Aéro Department de novembre 1961 à janvier 1970, puis basé en Floride à Coral Gables jusqu’a son départ la France en 1973, acquis par la société PYRENAIR qui l’exploita pour le largage de parachutistes jusqu’en 1979.

Acquis en 1983 par l’AJBS, grâce au soutien de serge Di Pascale, il restera immatriculé F-BTCS jusqu’en 1989, puis après une révision générale, il devint le F-AZEJ.

En 1985, son aile droite fut partiellement détruite par un début d’incendie provoqué par la chute accidentelle d’un NC 856 sur l’adérodrome de la Ferté.

Au début des années 2000, il reçut sa livrée actuelle: celle de l’avion personnel du Général Patton.

Beechcraft E18S / C45 F-AZEJ N° de série BA-359

Propriétaire : AJBS depuis le 26/08/1983

Immatriculé F-AZEJ le 31/08/1989

Constructeur: Beech Aircraft Corporation

1er vol: 15 janvier 1937

Motorisation : 2 x Pratt & Whitney R-985-AN-14B en étoile de 450 cv

Envergure : 15,15 m

Longueur : 10,73m

Hauteur : 2,84 m

Masse à vide : 2650 kg

Masse maxi décollage : 4490 kg

Vitesse maximale: 346 km/h

Rayon d’action: 1368 km

Photo: Harald Ludwig Le Beech 18

Source: le site de Richard Ferrière

http://richard.ferriere.free.fr/d18/d18.htm

L’aventure commence à Wichita

Walter Herschel Beech est né en 1891 à Pulaski dans le Tennessee. Passionné dès son plus jeune âge par les exploits des premiers aviateurs, il construit alors qu’il n’a que 14 ans, un planeur de sa conception avec lequel il réalise quelques sauts de puce. Le 11 juillet 1914, à 23 ans, Beech est lâché sur un biplan Curtiss et est breveté pilote. Jusqu’en 1917, il parcourt les états d’Amérique du Nord en réalisant des vols de démonstration dans des meetings improvisés accumulant ainsi heures de vol et expérience. En 1917, alors que les Etats Unis s’apprêtent à rentrer dans la première Guerre Mondiale, Beech s’enrôle dans le tout jeune Army Air Corps, où du fait de son expérience de pilote, il est affecté comme instructeur.

En 1919, il rejoint la Wichita Airplane Company créée par Jacob.M. Moellendick qui produit un des premiers avions de tourisme, le Swallow, conçu par Mally Laird. A la Wichita Airplane, Beech travaille avec les frères Laird et Lloyd Stearman. Mais rapidement des conflits apparaissent, les frères Laird quittent la Wichita Airplane pour fonder la Swallow Company. Puis en 1924, Llyod Stearman et Walter Beech qui prônent la construction métallique s’opposent à Moellendick et fondent ensemble Travel Air Manufacturing Company. C’est à cette époque que Clyde Cessna rejoint Travel Air. Le président de Travel Air est un financier, Walter Innes Jr, Clyde Cessna s’occupe de la partie commerciale et accessoirement de technique, Lloyd Stearman est le « Chief Designer », Walter Beech qui est le pilote le plus accompli des trois s’occupe des essais, de la mise au point et assure la promotion des avions Travel Air en participant à des compétitions (air race) et en s’attaquant à des records de vitesse, de distance et d’altitude.

Mais rapidement alors que Travel Air est en pleine expansion économique, un différent apparaît entre Beech et Cessna. Beech est un tenant de la formule biplane alors que Cessna est converti à la formule des monoplans cantilever. Bientôt, confronté à la crise économique de 1929, Travel Air éclate. Clyde Cessna créé à Wichita la Cessna Aircratt, Stearman fonde à Venice (Californie) la Stearman Aircratt Company. Travel Air est alors absorbé par Curtiss Wright dont Beech devient l’un des vice-présidents, il quitte alors Wichita pour la Côte Est et épouse, en 1930, sa secrétaire Olive-Ann Mellor.

Lindberg & Walter Beech

Olive-Ann Mellor et Walter Beech 

En 1931, ils reviennent à Wichita où ils fondent la Beech Aircraft Company. Walter occupe le siège de président alors qu’Olive-Ann prend en charge la direction administrative et financière de l’entreprise. Ted Wells, diplômé de Princeton, et qui avait travaillé auparavant chez Travel Air, se voit confié l’étude et le développement des projets. Le premier projet de la jeune entreprise est fort ambitieux, il s’agit de développer un biplan de grand tourisme capable d’emporter cinq personnes dans une cabine intérieure de grand confort à plus de 300 km/h et sur une distance de plus de 1000 miles. Le novembre 1932, le premier Beechcraft décolle du terrain de Wichita Field. Il s’agit du Beech 17 « Staggerwing » appelé ainsi parce que l’aile inférieure est décalée vers l’avant par rapport à l’aile supérieure. Après une rapide mise au point, cet avion est vendu à Ethyl Corporation sous les couleurs de laquelle il remporte en 1933 le Texaco Trophy Race. Le Beech 17 avait frappé fort car l’avion de grand tourisme avait battu en vitesse pure les appareils militaires alors en service !… Alors parmi les compétiteurs des air races, on disait sous forme de boutade que « seul un autre Beech peut battre un Beech ».

En 1934, commence la production en série du Beech 17 dont le succès commercial consolide les assises financières de la Beech Aircraft Company. Après s’être restructurée en 1936, la jeune compagnie qui s’est installée dans l’ancienne usine Travel Air, entreprend l’étude d’un nouveau modèle d’avion susceptible de répondre aux besoins des feeder airlines et des hommes d’affaire pressés. Les feeder airlines qui se développent très rapidement à cette époque aux Elats Unis et au Canada sont assimilables à ce que l’on appelle aujourd’hui en France les compagnies de 3ème niveau. Elles ont pour vocation d’assurer le transport de petite capacité sur des lignes intérieures délaissées, faute d’une rentabilité suffisante, par les grandes compagnies aériennes. Cette activité, qui est aujourd’hui encore quelque peu marginale en Europe où les pays sont de petites dimensions et où les réseaux routiers et ferrés sont denses, apparaît comme un vecteur de développement économique et de communications essentiel pour des états ayant les dimensions d’un continent. Dans ce type de pays (Etats Unis, Canada, Australie, Russie…) où la densité surfacique de population est très faible, le climat rude et la nature sauvage, la création et l’entretien d’infrastructures de communication au sol sont économiquement ruineuses et d’une utilisation inadaptée et parfois chaotique. De fait, les transports aériens qui n’impliquent que la création d’aérodromes plus ou moins sommairement équipés constitue la solution idéale pour des liaisons rapides, flexibles et peu coûteuses.

Le Beechcraft modèle 18

Le Beech 18, qui a été étudié par Dwane Wallace, est de conception résolument moderne . C’est un bimoteur de construction entièrement métallique, monoplan à ailes basses, équipé d’un train d’atterrissage escamotable.

Dwane Wallace & Walter Beech 

Le Beech D18

Le fuselage comporte trois parties:
– La partie avant qui comprend le nez, dans lequel se trouve la soute à bagages, et le poste de pilotage a une forme très galbée.
– La partie centrale occupée par la cabine-passagers présente un profil constant et une section pratiquement rectangulaire à l’exception du toit arrondi.
– La partie arrière raccordée à la cabine-passagers au niveau de la porte d’accès offre une section qui évolue de façon linéaire vers une pseudo-ellipse

au niveau de l’empennage horizontal.

Le fuselage est construit à partir de couples réalisés par assemblage de tôles de dural embouties reliés entre eux par un réseau serré de lisses. Le revêtement est assuré par des panneaux de dural minces rivés sur la structure. Les rivets à têtes bombées donnent aux surfaces un aspect rugueux. Le couple situé devant la première fenêtre de la cabine-passagers et celui situé entre la deuxième et la troisième fenêtre sont renforcés et servent de supports aux ferrures en acier sur lesquelles les longerons des ailes viennent se fixer. L’avant du fuselage est constitué d’une casserole formée à froid. Ce capotage, qui est articulé sur le dessus du fuselage, se relève vers le haut et sert de porte d’accès à la soute à bagages. La pointe arrière du fuselage est constituée d’un raccord démontable permettant d’accéder au mécanisme de rétraction de la roulette arrière.

Le poste de pilotage , est conçu comme un petit liner et accueille un pilote et un copilote, il est équipé de double commandes. Les ailerons et la profondeur sont actionnés par un volant fixé au tableau de bord, les dérives sont actionnées par un palonnier au sommet duquel sont placées les pédales de commande des freins hydrauliques. Sur un pupitre central et donc aisément accessibles par les deux pilotes, sont regroupées l’essentiel des commandes des moteurs (2 manettes de pression d’admission, 2 manettes de pas d’hélice, 2 manettes de mixture). En dessous de ces commandes, on trouve deux manettes pour la manœuvre des volets des capots moteur qui permettent de réguler le débit d’air de refroidissement et deux manettes qui assurent la même fonction au niveau des radiateurs d’huile. Puis on trouve la commande de rétraction du train d’atterrissage, le bouton moleté de réglage du compensateur d’aileron, la commande d’abaissement des volets de courbure. Enfin au bas du pupitre, on trouve les sélecteurs de réservoirs, le blocage de la roulette de queue, les contacts des magnétos, des pompes de gavage, des démarreurs électrique et les volants des compensateurs de direction et de profondeur.

Tableau de bord du Beech C45F « Expeditor »

Derrière les sièges des pilotes, une cloison sépare la cabine de pilotage de la cabine-passagers. Cette dernière peut être aménagée de façon

variable en fonction de l’utilisation de l’avion. Dans le cas de l’emport maximum de passagers, trois sièges tournés vers l’avant sont alignés le long de la paroi droite tandis qu’une banquette latérale pour 4 personnes est disposée le long de la paroi gauche. L’accès à bord se fait par une porte latérale articulée vers l’avant. La partie du fuselage située en arrière de la porte d’accès est occupée par des toilettes et un coffré à bagages. Le fuselage est éclairé de chaque côté par trois fenêtres rectangulaires et un hublot. La cabine n’était pas pressurisée mais un circuit d’oxygène permettait les vols à haute altitude.

Le profil de l’aile évolue depuis un NACA 23018 à l’emplanture vers un NACA 23012 au saumon avec un vrillage de -2°. L’aile est calée sur le fuselage à +4° et le dièdre latéral est de +6°. L’aile est construite autour de deux longerons réalisés à partir de profilés de dural et sur lesquels sont rivés les becs et les queues de nervures. Les nervures sont reliées entre elles par des lisses qui assurent le respect du profil et la rigidification en torsion.

Le revêtement de l’aile est assuré par des tôles minces de dural rivées sur les nervures, les lisses et les semelles des longerons. Le bord de fuite est occupé par les volets de courbure à commande électrique (braquage maxi 45°) et les ailerons commandés par câbles, tous deux sont de construction entièrement métallique. Un compensateur de roulis est encastré sur l’aileron gauche.

Les bords d’attaque peuvent, suivant les versions, être équipés de dégivreurs constitués de plaques de caoutchouc dans lesquelles sont noyées des résistances électriques chauffantes. Sur la partie du bord d’attaque, comprise entre la nacelle-moteur et le fuselage, sont disposées deux entrées d’air: l’une rectangulaire alimente le radiateur d’huile, l’autre circulaire sert à la ventilation de la cabine. Le carburant est réparti dans quatre réservoirs métalliques situés dans les ailes avec une capacité totale de 206 US Gallon (780 1)

Les bâtis-moteurs sont composés de structures triangulées en tubes d’acier soudés et sont boulonnés sur des renforts fixés aux longerons principaux. Ces bâtis supportent l’articulation et le mécanisme de rétraction du train d’atterrissage, le collecteur d’échappement, le réservoir d’huile (19 1), les dispositifs auxiliaires tels que batteries et extincteurs et la cloison pare-feu. Les moteurs sont fixés à l’avant des bâtis au moyen de silentblocs. Le profilage des moteurs enveloppe l’extrados et l’intrados de l’aile. Dans les premières versions du Beech 18, le profilage d’extrados présentait

une très forte courbure. Cette courbure fut diminuée sur les modèles ultérieurs pour obtenir un raccordement plus doux avec l’extrados.

Les profilages des moteurs supportent les articulations des trappes d’obturation des puits de roues. Ces trappes sont évidées pour laisser place aux pneus qui dépassent du profilage une fois le train rétracté. Le profilage est également découpé pour laisser passer une pipe de gros diamètre qui évacue les gaz contenus dans le collecteur d’échappement. Les capots-moteurs NACA sont divisés en deux parties, la partie inférieure supporte les volets articulés de refroidissement qui permettent de moduler le flux d’air circulant autour des cylindres.

Le train d’atterrissage principal est composé de deux jambes comportant chacune un amortisseur oléopneumatique. A l’extrémité de chacune d’elles est fixée une fourche en tube d’acier. Les deux parties de l’amortisseur sont immobilisées en rotation par un compas. Le train s’escamote au moyen d’un moteur électrique qui peut être suppléé en cas de panne par une commande de secours mécanique. Les freins de roues sont actionnés de manière hydraulique et indépendante par pression sur des pédales situées au sommet des palonniers. La roulette de queue est escamotable et est montée folle sur son axe de manière à assurer une maniabilité maximum lors du roulage au sol qui est conduit par action différentielle sur les freins. Un dispositif permet le blocage dans l’axe de la roulette pour le décollage et l’atterrissage.

L’empennage horizontal de construction métallique est fixé par boulonnage sur le sommet du fuselage avec un calage de +2°. La gouverne de profondeur à structure métallique est entoilée; son bord de fuite est occupé par un compensateur actionné par câbles depuis le poste de pilotage et par un anti-tab automatique. Les dérives de forme pseudo-elliptiques sont fixées aux extrémités du plan fixe. Les gouvernes de direction à structure métallique sont entoilées. Un compensateur de lacet est placé au bord de faite de chaque gouvernail tandis qu’un bec débordant assure la compensation statique et aérodynamique des efforts aux palonniers. Les gouvernails de profondeur et direction sont actionnés par câbles. Suivant les versions, des dégivreurs peuvent être installés sur le bord d’attaque du plan fixe et sur le bas des dérives.

La carrière du Beech 18

Le 15 janvier 1937, le prototype du Beech D 18A fit son premier vol piloté par James Payton et Henry Rankin. L’appareil immatriculé NC 15810 était équipé de deux moteurs en étoile Wright R 760 E2 de 320 ch qui entraînaient des hélices Hamilton-Standart à vitesse constante. Les capots-moteurs de faible diamètre ne possédaient pas de volets mobiles de refroidissement et présentaient des bossages profilant les culasses. Le D 18 se comporta remarquablement bien et après une période d’essai relativement courte, il obtint en mars 37 sa certification. Immédiatement la clientèle manifesta son intérêt pour le Twin Beech qui fut proposé en trois versions:

  • Le D 18B avec deux moteurs Jacobs L-5 développant 285 ch
  • Le D 18D avec deux moteurs Jacobs L-6 développant 300 ch
  • Le D18S avec deux moteurs Pratt&Whitney « Wasp Junior » de 450 ch Les différentes versions étaient proposées avec des kits d’adaptation permettant de remplacer le train à roues par une paire de skis ou une paire de flotteurs. Ces derniers intéressaient particulièrement les clients canadiens mais les premiers hydravions livrés montèrent que la traînée et les turbulences engendrées par les flotteurs entraînaient une instabilité latérale dangereuse. Les dérives furent donc agrandies et une quille de lacet fut ajoutée sous l’arrière du fuselage. Le dessin des nouvelles dérives furent conservé et systématiquement appliqué sur tous les modèles.

D18 prototype avec moteurs Jacobs

A partir de 1939, différentes armées de l’air prirent contact avec Beech Aircraft pour dériver du D18S un modèle militaire destiné aux liaisons rapides, au transport léger et aux évacuations sanitaires. Ce modèle baptisé D 18R fut livré au gouvernement chinois de Chang Kaï Cheick: 25 appareils en version classique et 5 exemplaires modifiés avec un nez vitré et une tourelle dorsale pour permettre l’entraînement des équipages de bombardiers.

A partir d’août 1940, les commandes de l’US Army Air Force et de l’US Navy pour le modèle D 18S rebaptisés respectivement C 45 Expeditor et JRB-1 mobilisèrent 90% du potentiel de production de Beech Aircraft. Les appareils reçurent différentes affectations telles que la liaison et le transport léger de fret en passant par la reconnaissance, la photographie aérienne ou le radioguidage de cibles et de bombes planantes.

Beechcraft JRB-1 de l’US Navy utilisé pour les expérimentations sur le radioguidage des bombes planantes

Sous la désignation AT 7 Navigator, le D18 fut affecté en nombre aux écoles américaines de perfectionnement des équipages de bombardement et de transport.

C45a Expeditor de l’USAAF

Beechcraft AT7 Navigator de l’US Navy

Beechcraft AT 7 hydravion

En 1941, le général Douglas Arnold, en visite chez Beechcraft, marqua son intérêt pour la version à nez vitré qui avait été proposé à la Chine en 1939. L’objectif était d’utiliser un appareil économique pour la formation opérationnelle des équipages de bombardiers lourds aux fonctions de bombardier et mitrailleur. 150 exemplaires d’un nouveau modèle baptisé AT 11 Kansan par l’USAAF et SNB-1 par l’US Navy furent commandés. L’AT 11 ne différait du C 45 que par l’aménagement d’une place dans le nez qui était vitré et équipé d’un viseur Norden, par l’installation d’une tourelle électrique dorsale armée de deux mitrailleuses Browning de calibre 30 (7.62 mm) et d’une soute à bombes pouvant accueillir 20 projectiles de 25 livres. On estime que 90% des bombardiers et navigateurs de l’USAAF et 50% des pilotes de multimoteurs furent formés sur AT 7 et AT 11.

Walter et Olive-Ann Beech dans l’usine de Witchita où sont produits en série des SNB Kansan destinés à l’US Navy

Le Twin Beech, principalement dans sa version C 45F Expeditor fut livré au titre du prêt-bail ou du plan Marshall pour pourvoir au rééquipement des armées des pays qui allaient bientôt s’allier dans le cadre de l’OTAN. Après la guerre, un grand nombre de C 45 et AT 7 furent reversés aux surplus et rachetés par des particuliers, des compagnies de transport de troisième niveau et par Beech Aircraft. Une partie des cellules récupérées par Beech furent révisées et modernisées puis revendues à l’USAF et à l’US Navy sous la désignation C45 G et C45 H où ils restèrent en service jusqu’en 1962.

En France le C45 fut largement utilisé par l’Armée de l’Air comme avion école et de liaison tant en métropole qu’en Algérie ou dans les colonies d’Afrique Noire. Il fut également utilisé au Centre National de Saint-Yan pour assurer la qualification multimoteur et la formation IFR des futurs pilotes de ligne.

A la fin des années 50, le Centre National de Saint Yan formaient les élèves pilotes de ligne: le matériel de l’école était composé de Stampe pour le perfectionnement au pilotage, de Morane-Saulnier 733 pour la navigation et de Beechcraft C 45 pour l’IFR

Le Beech E18S

L’autre partie des cellules récupérées fut utilisée par Beechcraft pour réaliser un nouveau modèle destiné à la clientèle civile et caractérisé par un nez plus long et plus pointu, par un fuselage plus haut, par de nouveaux saumons d’aile, par une porte latérale double faisant office de porte cargo et d’échelle de coupée. Ce modèle appelé E 18S « Super 18 » fit son premier vol en décembre 1953, il fut suivi par le H 18 à train tricycle.

Proto du beech E18S

Beech G-18 cargo

Le H18 tricycle

Le E18 S Hydro

En 1957, John Gaty, vice-président de Beech Aircraft, en visite en France fut intéressé par les projets de turbines Bastan et Astazou développés par Turboméca. Cette société créée par Joseph Szydlovski avait pris une avance certaine dans le domaine des turbopropulseurs de faible puissance.

Gaty avait alors perçu l’intérêt d’équiper des avions de transport léger militaires avec ce type de moteur à la fois puissant et léger et consommant un carburant identique à celui des réacteurs. L’accord conclu en décembre 1957 à Mérignac entre Gaty et Badre (directeur de SFERMA filiale de Sud-Aviation) consacre le démarrage du projet qui est placé sous la direction du célèbre ingénieur-pilote Jacques Lecarme de Sud-Aviation. Pour Gaty, le deal passé avec les Français est particulièrement intéressant car il ne coûtera pratiquement rien à Beechcraft.

Pour la SFERMA, Turboméca et hélicier Ratier-Figeac, la perspective de pénétrer le marché américain et devenir fournisseurs de l’Air Force suscite l’enthousiasme. Un Beech UC 45G-BH (serial number 51-11772), acheté en Belgique par le Ministère des Postes et Télécommunications, est prêté à la SFERMA au début 58 et modifié de manière à prendre en compte les propriétés de la nouvelle motorisation. Les dérives sont agrandies de 15% vers le bas pour tenir compte de l’augmentation de puissance, une roulette de queue plus haute et un nouveau train plus solide sont montés.

L’appareil appelé Beech-SFERMA PD 18.9 fait son premier vol le 19 septembre 1958 à Mérignac. Le bon comportement de l’avion permet d’explorer rapidement le domaine de vol, il est ensuite confié en décembre au CEV pour déterminer les conditions extrêmes de fonctionnement des turbopropulseurs. L’expérimentation devait se poursuivre avec le montage de turbines Astazou sur une cellule de Travel Air sous la désignation de Beech-SFERMA Marquis.

La collaboration avec Beechcraft devait cependant s’arrêter là faute de débouchés commerciaux bien identifiés. Cette expérimentation devait malgré tout bénéficier largement à Turboméca qui allait devenir l’un des leaders mondiaux de la turbine de faible puissance. Après ces expérimentations, le Beech fut réimmatriculé F-SEBA et remis aux standards UC-45 pour être utilisé par le CNET comme avion-navette entre l’aérodrome de Villacoublay et le Centre de Recherche de Lannion

Beech-SFERMA PD 18.9 avec 2 turbines Turboméca Bastan IVB

C 45 utilisé par Pratt & Whitney Canada pour les essais de la turbine PT 6

Épilogue

La production du Beech 18 s’arrêta en 1969 après que 9100 appareils aient été produits. Une centaine d’entre eux sont toujours exploités commercialement aujourd’hui que ce soit au Canada où il est considéré comme un « bush plane » fort convenable, aux Etats Unis, en Amérique du Sud et aux Caraïbes où il sert principalement aux liaisons entre la multitude de petites îles qui forment l’archipel. 60 ans après son premier vol, le Beech 18 n’envisage pas pour l’instant de prendre sa retraite.

En novembre 1950, Walter Beech meurt d’une crise cardiaque, la société est alors reprise par Olive-Ann qui développe les activités dans le domaine de l’aviation légère et d’affaire avec des avions tels que les Bonanza (conçu en 1947 et toujours considéré comme un must), Travel Air, Baron, Queen Air, King Air, Beech 99… Femme d’affaire avisée, Olive-Ann Beech diversifie les activités de Beech Aircraft Company vers la sous-traitance aéronautique pour des firmes telles que McDonnell, Lockheed, Martin Marietta, Bell et vers le domaine spatial dans le cadre des programmes Gemini, Appolo et Lunar Module. En 1980, par le jeu des concentrations industrielles, Beech Aircraft passe sous le contrôle de Raytheon Company. Le 6 juillet 1993, Olive-Ann Beech, qui fût pendant 30 ans la seule femme qui ait jamais dirigé une firme de construction aéronautique, meurt à l’âge de 90 ans.

J’ai piloté le Beech 18

Jacky DRUESNES et Pierre FAGES racontent:
« Avion de transport léger qui, à la première vue d’un pilote, peut avoir quelques difficultés à être emballé par une telle machine.

Celui-ci change radicalement d’avis lorsqu’il est aux commandes de ce bi moteur mythique possédant une carrière militaire et civile de plus de 32 ans qui débuta en 1943.

Démarrer les PRATT de 450ch et écouter leur ronronnement, c’est le début d’un plaisir sans cesse renouvelé à chaque vol.

Le roulage est sensible au vent; naturel pour un train classique et ses doubles dérives. Je le conduis doucement jusqu’à la piste d’envol

Après les essais des moteurs et la « check list effectuée », je positionne la BICHETTE comme on l’appelle familièrement sur l’axe de piste,

je roule quelques mètres pour bien centrer la roulette de queue et je commence à sentir l’odeur de l’huile chaude en augmentant les gaz.

Je relâche les freins et en début d’accélération, je jette un rapide coup d’œil aux instruments qui racontent leur histoire de température et de pression. J’avance lentement les manettes sous la surveillance de mon mécanicien Jacky en place droite, qui ne peut s’empêcher de mimer mes gestes et j’attends après avoir pris un peu de vitesse que la direction devienne efficace et sentir l’inégalité du sol pour soulager la roulette de queue.

Le décollage reste un moment fort où les moteurs sont poussés progressivement à 36 pouces, les hélices HARTZELL à 2300t/m qui hurlent, puis s’apaisent après la réduction à 2000t/m, dés que le train est rentré.

La montée initiale est lente. C’est suite à la rentrée des traînées, suivi d’un réglage précis des fletners sur les trois axes que l’on peut apprécier l’aisance de cet avion en évolution

Nous pouvons alors écouter la musique du doux ronronnement des moteurs synchronisés qui nous entourent et nous protègent tels deux anges gardiens.

Jacky jubile de bonheur.

En croisière, l’avion reste très agréable et confortable, la vitesse de 150kts lui permet d’avaler les nautiques sans qu’on se lasse de le piloter.

A l’atterrissage, il faut être vigilant surtout sur piste en dur et vent de travers.

Mais c’est un réel plaisir de travailler son pilotage.

La bête a l’habitude de tester sa monture et il sait quelquefois se montrer joueur. Il faut savoir le tenir sans être brutal pour le ramener docilement sur la bonne trajectoire.

Sinon, c’est un luxe de sécurité, avec une bonne instrumentation classique de base et deux moteurs rustiques et increvables qui lui permettent un vol d’une qualité rare et unique.

Voler sur Beech 18 S ! C’est SUPER »


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